Moi qui espérais pouvoir garder une régularité dans l’écriture
après mon cancer… c’est raté. Parfois je me dis tant mieux, si j’ai moins de
choses à dire et moins de colère face à cette maladie aussi. Mais au fond, c’est
surtout que je me laisse happer par ma routine et que je ne prends plus le
temps.
Il faut dire que mon quotidien tourne (presque) exclusivement autour
de ma fille et que maman solo, ça ne me laisse que trop peu de temps pour moi
et que bien souvent durant ces courts moments, je vais privilégier le footing, un
tour au bord de mer, un rendez-vous ou même une petite sieste plutôt que me
replonger dans les mots/maux.
En toute sincérité aussi, il y a cette volonté de m’éloigner chaque
jour un peu plus du cancer, d’oublier les souffrances et les pertes, même si
tout cela fait partie de moi et font celle que je suis aujourd’hui mais désormais,
je préfère m’attarder sur les rires de ma fille et faire en sorte de lui
assurer un avenir plutôt que sur les traces de mon cancer passé.
Bien sûr on n’oublie pas, bien sûr la peur est toujours là, bien sûr
les séquelles sont encore présentes (contrairement à ce que peuvent affirmer
les médecins de la sécu, commissions de la MDPH et autres « spécialistes
du genre » sans même prendre le temps de vous recevoir…) mais si on veut
continuer à avancer, un pied devant l’autre il faut aussi savoir mettre la
maladie de côté et se rappeler où est l’essentiel. J’avoue avoir baissé les
armes face à certains combats, lasse d’enfiler le costume de Don Quichotte. Ce
qui ne veut pas dire que j’accepte pour autant mais j’ai juste peur de passer à
côté de ce qui est vraiment important et finir par devenir aigrie à trop m’enfermer
dans les injustices liées aux cancers. Je ne mets pas tout entre parenthèses,
je reste engagée aux côtés de mon association Le Jour d’après et je continue à
communiquer ou partager sur les sujets qui me tiennent vraiment à cœur quand j’en
ai la possibilité mais je n’en fait plus le fil conducteur de ma vie.
La vie peut être très (trop) courte, et il peut se passer mille
autres choses qu’une récidive pour qu’elle cesse en un claquement de doigt
alors il faut la vivre et ne plus passer à côté. Il faut s’écouter, s’entourer d’amour
et s’éloigner du toxique. C’est ce que je m’efforce de faire chaque jour, en
construisant pour ma fille et moi un cocon le plus doux possible. J’ai eu mon
lot de malheurs alors à moi de faire en sorte d’avoir mon lot de bonheurs
puisque je suis seule responsable de ma vie et de mes choix. C’est surement ça
finalement la résilience, non ?
C’est aussi le message que nous fait passer cette maladie quelque
part. A trop étouffer nos besoins, à s’enfermer dans des situations qui ne nous
conviennent pas, à vivre en apnée… autant professionnellement que personnellement.
Un moment donné notre corps dit stop et il
explose comme un volcan. C’est l’image que me renvoie mon cancer du sein.
Le premier et merveilleux bonheur auquel j’ai le droit aujourd’hui
c’est ma fille, mon petit miracle post-cancer. C’est loin d’être tous les jours
évident, encore une sacrée aventure à laquelle on n’est pas du tout préparé
mais je ne regrette aucun moment, mêmes les plus difficiles. J’apprends chaque
jour avec elle. Je me remets en question encore et encore. Et je cesse enfin de
culpabiliser car aujourd’hui, je sais que j’ai fait les bons choix, peut-être
pas les meilleurs… mais les bons car rien n’est parfait dans la vie.
Le chemin de l’après cancer est long mais petit à petit on se
réaligne avec soi-même, on va vers ce qui fait sens pour nous et surtout on
laisse derrière ce qui nous pollue.
Bref tout ce long
laïus illustrant mon état d’esprit quatre années après avoir échappé aux pinces
du crabe afin d’introduire quelques mots sur le cancer pour octobre rose :
Encore aujourd’hui, il me
tient à cœur de témoigner et exprimer mon point de vue sur le sujet en tant qu’ancienne
cancéreuse. Je sais le mot n’est pas joli mais le cancer ne l’est pas plus. Il
n’est pas non plus un tremplin professionnel ou social, contrairement à ce que
peut donner comme impression les réseaux sociaux et la médiatisation de masse. Tant
mieux si certains et certaines ont réussi à rebondir après le cancer (et j’en
fait partie, à ma façon) mais ce n’est pas toujours le cas. Il prend plus qu’il
ne donne, et on perd plus qu’on ne gagne, il ne faut SURTOUT pas l’oublier. C’est
simplement notre façon d’aborder la vie qui change. Alors bien que je n’apprécie
guère tout le battage édulcoré de rose fait autour du cancer du sein durant ce
mois d’octobre il est tout de même important de parler de prévention et de rappeler
que le cancer du sein est la principale cause de mortalité chez la femme. Il ne
se guérit pas toujours, on en meurt encore ! J’ai de la CHANCE d’être
encore en vie car malgré les progrès et les bons médecins, on ne gagne pas
toujours la bataille. Et certaines femmes devront vivre avec lui et ses
conséquences jusqu’à la fin de leurs jours. Et puis j’ai eu un cancer avant mes
30 ans : il n’attend pas tranquillement que vous ayez entamé vos projets,
il vous percute de plein fouet à n’importe quel moment de votre vie et vous
fait perdre un temps précieux. Alors le seul conseil que j’ai a donné
finalement c’est écoutez-vous, écoutez votre corps, connaissez-le, appréhendez-le
et au moindre doute, à la moindre petite grosseur ou sensation anormale, allez
consulter et faites confiance à vos intuitions. Elles vous sauveront peut-être
la vie.
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