Ronron thérapie |
Même si au cours de notre vie, certains rêves
s’écroulent, même si nous n’arrivons pas à garder le sourire tous les jours,
même si nous sommes déçus, même si le bonheur nous parait parfois loin, très
loin et insaisissable, cela vaut le coup de s’accrocher, et de continuer à
viser la lune pour au moins décrocher une petite étoile.
Aujourd’hui,
enfin dans quelques mois, je vais enfin pouvoir décrocher mon étoile. Je vais
devenir la maman d’une petite fille.
Depuis
mon enfance la vie n’a pas été tendre avec moi. Beaucoup d’épreuves dont on se
passerait bien. Même si parfois j’ai eu envie de baisser les bras, j’ai
continué à avancer malgré tout, en me disant que même si c’était difficile,
j’avais tout de même le droit à des petites bulles de bonheur et qu’à un moment
donné, la vie finirait par me faire un cadeau…
Et voilà,
surprise, une grossesse : mon profond désir d’enfant, pourtant mis à mal
par le cancer, est enfin comblé. Je vais mettre au monde un petit être dans
quelque temps. Le voilà ce cadeau de la vie qui va enfin faire vibrer mon cœur.
Ce
n’était pas gagné d’avance… comme je l’ai écrit dans un précédent article Je veux un enfant, apprendre que le cancer pouvait me priver de maternité a
été très dur à avaler…
Quand on
vous parle cancer du sein, contrairement aux autres cancers gynécologiques
comme celui des ovaires ou de l’utérus, a aucun moment on pense que cela
pourrait impacter la fertilité, et pourtant. Les traitements sont lourds et
toxiques, ils s’attaquent aux cellules qui se renouvellent sans cesse. C’est
pourquoi les cheveux sont si vite impactés. Il en est de même pour le système
reproductif… La chimiothérapie s’attaque à tout le corps sans exception. Cela
peut donc provoquer une destruction de la réserve ovarienne ainsi qu’un
vieillissement prématuré de l’appareil reproducteur féminin et donc créer une
stérilité.
Dans le
meilleur des cas, quand le cancer n’est pas trop avancé, et que le début des
traitements peut être retardé, les oncologues proposent de faire une
préservation d’ovocytes. Une opération qui consiste à prélever et congeler des
ovocytes pour plus tard, et donner au malade une chance de concevoir un enfant,
après le cancer.
Je n’ai
pas pu bénéficier de cette intervention car chez moi la tumeur progressait de
manière fulgurante et il était donc impossible de retarder les traitements…
L’annonce
du cancer en lui-même est un terrible choc mais toutes les petites annonces
annexes : « vous allez perdre vos cheveux », « vous allez
perdre un sein », ou encore « vous ne pourrez peut-être pas avoir
d’enfants » le sont tout autant. Le cancer a un effet ricochet… Ce n’est
pas seulement accepter l’idée que l’on risque de mourir dans les prochains mois
c’est aussi apprendre à renoncer à des choses auxquelles jamais on aurait pensé
devoir renoncer un jour.
Ne
pouvant donc pas mettre mes petits ovocytes de côté, l’oncologue m’a proposé un
traitement alternatif, sur lequel nous n’avons pas encore assez de recul pour
avérer son efficacité, mais qui permettrait de protéger le système reproducteur
en le mettant en ménopause artificielle. Forcement des effets secondaires, mais
désirant pouvoir être mère un jour, j’accepte, mieux vaut tenter le coup.
Cette
question de fertilité m’a beaucoup travaillée. J’ai donc pris l’initiative de
consulter une spécialiste, pour faire état de ma réserve ovarienne. Bien que ce
rendez-vous m’ai beaucoup appris sur les effets de la chimiothérapie sur la
fertilité, je n’ai pas pu en savoir plus sur la mienne, car étant en plein
traitement, le diagnostic était impossible.
En mars
2017, pour la modique somme de 50 euros… j’ai enfin pu en savoir plus sur
l’état de ma fertilité. Bonne nouvelle a priori tout fonctionne et j’ai une
bonne réserve ovarienne pour une ex-cancéreuse. Mais ce qu’il faut savoir en ce
qui concerne la fertilité, c’est justement qu’on ne sait rien ! En effet,
certaines personnes présentant aucun souci apparent n’arriveront pas à
concevoir un enfant alors que chez d’autres dites « stériles », ou
présentant des problèmes de conception, un bébé finira par pointer le bout de
son nez naturellement.
Mais même
si ce résultat positif, ne signifie pas grand-chose, il me met du baume au
cœur. Enfin une chose, qu’a priori le cancer ne m’a pas pris ! Il me
faudra tout de même patienter un an avant de pouvoir essayer de concevoir un
enfant, le temps que mon corps évacue tous les produits chimiques dont on l’a
gavé durant toute une année et que les effets néfastes de la radiothérapie
s’estompent.
Début
d’année 2018, nous arrêtons la contraception avec mon conjoint. Nous désirons
avoir un enfant. On ne sait pas trop combien de temps cela va prendre. Nos
situations professionnelles sont loin d’être stables mais j’ose espérer qu’avant
l’arrivée du bébé, les choses s’amélioreront. J’ai 31 ans et très certainement
un vieillissement prématuré de toute la machinerie de ma fabrique à bébés alors
je n’ai pas envie de perdre plus de temps… et toujours la peur de disparaître…
Mais cela
ne vient pas aussi vite que je l’espérais… Chaque mois, au retour de mon cycle,
c’est la déception… et plus le temps passe plus cette déception est grande… On
entend beaucoup que ça se passe dans la tête, qu’il ne faut pas se mettre trop
de pression, qu’il faut se détendre pour que ça arrive, etc. Mais c’est tellement
plus facile à dire qu’à faire… Je me persuade qu’il y a un souci et que
peut-être finalement, le cancer y est pour quelque chose… Les rouages de la
machine sont cassés…
Décembre
2018, après quasiment un an de tentatives ratées, je décide de consulter la
gynécologue pour en savoir plus. Au vue de mes antécédents médicaux, elle nous prescrit
à l’un comme l’autre des examens pour en savoir plus.
Je
commence ma batterie d’analyses en janvier 2019. Prise de sang à 50 euros
numéro 2… qui nous donnera toujours ce même résultat peut significatif… Prises
de sang également à différents moments du cycle afin d’observer les taux des
différentes hormones nécessaires à la conception d’un enfant. Puis une échographie
qui nous dit qu’a priori tout à l’air en ordre…
Pour terminer une hystérosalpingographie.
Un nom barbare pour décrire quelque chose qui l’est tout autant ! C’est un
examen radiographique durant lequel on aspire vos trompes de Fallope puis on y
injecte un produit de contraste afin d’observer le passage. Il permet de
constater d’éventuelles malformations, tumeurs ou adhérences. Je ne suis pas
une douillette, cela a été terriblement douloureux pour moi. Bien que très
rapide cela m’a paru interminable. Cris de douleurs, muscles crispés, mains
accrochées à la table glaciale et larmes aux yeux. La radiologue en a pris pour
son grade également. Quelques adhérences en début de parcours mais le produit
est finalement bien passé dans la cavité utérine et les trompes. La douleur persistera
une bonne semaine avant de s’estomper et enfin pouvoir oublier tout ça.
Conclusion
après ces différentes analyses… a priori tout devrait fonctionner. Et s’il y
avait un petit souci d’adhérence, la séance de torture appelée hystérosalpingographie
aura surement réglé le problème ! Les examens de mon partenaire auront
lieux que dans plusieurs semaines… On attend donc encore patiemment.
Mars
2019, tous les examens sont faits, nous attendons encore quelques résultats et
le prochain rendez-vous avec la gynécologue ne sera qu’en avril. Il faut être
patient…
Mes
règles sont à la bourre, ce qui n’arrive que très rarement mais je ne m’affole
pas car je ne veux pas être déçue encore une fois. Cela est peut-être lié à
tous ces examens qui ont mis mon utérus à rude épreuve. Je n’ai pas mal à la
poitrine, en même temps après un cancer du sein, difficile de se fier à eux
comme témoins ! Apparition d’une plaque d’acné mais qui peut être tout
autant le signe d’une grossesse que de mes derniers excès de chocolat…
Une
semaine s’est passée… toujours pas de règles… Je me décide à aller acheter un
test de grossesse en sortant du boulot. Surtout que dans 3 jours je dois passer
l’IRM de contrôle pour mon cancer. Période déjà assez stressante comme ça, j’ai
besoin d’être fixée. Je patiente jusqu’au lendemain avant d’uriner sur le petit
bâtonnet mais ce matin-là, avant même de lire le résultat, je le sens au plus
profond de moi, c’est une évidence, je suis enceinte. Bingo, 3 minutes plus
tard, le test me confirme mon intuition ! C’est parti, un bébé est en
route !
Et sur le
chemin du boulot, passe juste au-dessus de mon pare-brise… une cigogne !
Si ça ce n’est pas un signe !!!
Arrivée au bureau, j’appelle
d’abord mon chirurgien et le centre d’IRM pour leur annoncer ma récente
découverte. Résultat : rendez-vous en urgence avec le chirurgien pour un
examen clinique et IRM annulé, car cela pourrait mettre en danger le développement
embryonnaire. Un sacré stress de louper cette étape de la surveillance du
cancer. Mais mon chirurgien est très rassurant. Il m’annonce que je ne serai
donc plus suivi durant toute la grossesse et que nous reprendrons les examens 3
mois après la naissance. Il me dit que l’important est de me concentrer sur ma
grossesse et qu’au moindre doute ou inquiétude il me recevra.
Il a
raison, j’ai envie d’oublier ce cancer et cette dame Oclès penchée depuis des
mois au-dessus de mon épaule, et durant ces prochains mois je ne vais penser qu’à
ma grossesse. Ce joli cadeau que me fait la vie. Bien sûr, plus le temps
avance, plus j’y pense. Je me dis que faire un enfant est un choix égoïste
surtout lorsqu’on a une santé plus fragile que les autres mais c’est aussi la
plus belle chose que l’on peut faire dans sa vie alors ça vaut le coup ! Evidemment,
le spectre du cancer plane toujours. J’ai peur d’être à nouveau malade et de
disparaître en laissant ma petite scarmoza derrière moi. L’avenir, son avenir m’inquiète
beaucoup, mais je crois que c’est aussi cela devenir mère.
Renaud - Morgane de toi
Magnifique texte. On ressent tellement d'émotions en te lisant.On te souhaite que du bonheur à toi ton bomme et la future petite Scarmoza.
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